A la recherche d'un équilibre. [ PV : Lee Yuu Seon ]

Un après-midi radieux à Séoul. Une température exquise : ni trop chaud, ni trop froid, une légère brise pour rafraichir la population, aucun nuage, juste un ciel incroyablement bleu et un soleil somptueux. C'est pourquoi Huang avait décidé de sortir du pensionnat. Les cours pour lui n'avaient pas encore commencé. Venant à peine de s'installer, il ne pouvait rester une minute de plus dans le peu de cartons qui avaient constitué sa vie. Quelques vêtements et autres affaires qui lui appartenaient. Il n'avait emporté aucune photographie, rien qui ne puisse lui faire penser à la famille à laquelle il avait appartenu. Il n'avait emporté que lui et lui seul. Rien d'autre.

Oui, c'était une belle journée et il ne pouvait pas rester une minute de plus dans ce petit coin appelé son " chez lui " maintenant. Il ne voulait plus de " chez lui ". Il voulait juste être libre. Après avoir claqué la porte de sa nouvelle chambre, il sortit, tenant à la main son magnifique Stradivarius. Marcher pour oublier. Il adorait ça, depuis toujours. Se mettre dans un coin reculé d'un parc, s'assoir dans l'herbe et jouer. Un mélange celtique, l'influence de son frère aîné, et l'harmonie du violon.

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Son archet tomba au sol dans un soupire. Pourquoi aimait-il tant de choses qui lui rappelaient cette vie qu'il détestait ? Huang se releva et rangea son violon. L'heure n'était pas à flâner ni à penser. C'était encore trop douloureux. Il devait s'occuper de quelque chose de plus... Particulier. Depuis sa rencontre avec Jun-kun, il ne savait plus trop où donner de la tête. Et pourtant... Les fois où ils étaient ensemble, Huang ne lui parlait presque pas. Il faisait pire ; il l'observait. Qu'est-ce que cela voulait dire ? Il n'y avait pas lieu de ce poser ce genre de questions. Ce ne pouvait pas être possible. Toujours célibataire, il devait absolument se trouver une jolie coréenne avec qui sortir. Même s'il devait en changer toutes les semaines voir tout les soirs, peu importait du moment qu'il n'était pas seul et qu'il n'avait pas à réfléchir sur sa relation possible avec son meilleur ami. La pochette avec son violon rangé dedans en main, il se mit à parcourir le parc à la recherche d'une jolie demoiselle. De toute façon, avec son look un peu à la bad boy, ses cheveux coiffés en bataille et son regard ténébreux, il se dit que l'attente ne serait pas longue.

Avait-il, pour une fois, de la chance ? A peine fit-il quelques pas qu'il repéra une jeune fille assise sur un banc. Il passa sa langue sur ses lèvres. Toujours aussi inexpressif, il soupira et finit par s'assoir près d'elle. Que pouvait-il bien lui dire ? D'habitude, il n'avait rien à faire, rien à dire : les filles tombaient comme des mouches à ses pieds, le suppliant de sortir avec lui. Il avait tout ce qu'il désirait, alors pourquoi partir à la chasse ? Non, il devait innover sinon, il n'avancerait pas. Il devait surtout penser à ne pas tomber dans le filet qu'il s'était crée avec la rencontre de Junishiro. Adossé contre le rebord du banc, il se pencha vers la jeune fille et, sans un sourire, comme à son habitude, chuchota avec de grands yeux noisettes :

" - Salut ... ".

Levant un instant la tête vers le grand ciel bleu azur totalement dépourvu de nuages qui s’offrait à lui, le jeune coréen esquissa un doux sourire. La température de l’air était douce et légère, et il y avait même une délicate brise qui s’amusait à faire voleter les cheveux des Séoulites. C’était dans des moments comme celui-ci que l’androgyne était ravi de ne pas avoir cours les après-midi de ce jour de la semaine. Car au lieu d’être bloqué dans une salle de cours pleine de jeunes hommes en tout genre et remplie de bruits de ceux-ci qui l’empêchaient de se concentrer sur le cours donné alors, il pouvait profiter de ses heures libres pour flâner dans les rues de la capitale coréenne et prendre du bon temps. Et ce jour-ci, c’était ce qu’il avait prévu de faire. Alors une fois la cloche de Yi Sun Sin retentie, il ne perdit pas son temps et alla directement chez lui pour se changer et se refaire une petite beauté avant de partir à la conquête de sa ville natale. Une fois arrivé à sa maison, il resta un moment perplexe devant le grand miroir mural de sa chambre. Il faisait vraiment bon dehors, mais étant un peu frileux, il cherchait dans sa tête quelle tenue irait donc le mieux pour ses projets de sorties. Décidant d’aller chercher directement dans son –on ne va pas le cacher- immense dressing, il finit par opter pour un slim noir et un T-shirt blanc caché sous un pull noir très large à longues manches. Une fois sa tenue enfilée, il y ajouta quelques bracelets comme à son habitude. Tout ceci fait, il s’attaqua dans sa salle de bain à sa coiffure et son maquillage. Yuu Seon ne prit alors pas étrangement beaucoup de temps, se recoiffant juste légèrement les cheveux et remettant du noir sur ses yeux, pour accentuer davantage son regard qui était d’après certains « ensorcelant ». Il était fin prêt. Riant légèrement à son propre reflet, il prit ses clés et son portable, et sortit donc de chez lui, plutôt de bonne humeur.

Une fois dans la rue, la délicieuse brise lui caressant ses joues légèrement rosies, l’androgyne se demanda alors où aller. Il avait envie de se poser dans un endroit calme, où il pourrait aussi bien piquer un petit somme que réfléchir à la lettre qu’il voulait écrire à sa nourrice. Alors, vu le temps somptueux qui régnait sur la ville, il décida d’en profiter au maximum et aller au Seoul Forest, le plus beau parc. C’est donc mains dans les poches, et en chantonnant d’un air heureux qu’il arriva rapidement aux grilles du parc. Il jeta un rapide coup d’œil à l’intérieur, et constata avec soulagement qu’il n’était pas remplit de monde. Yuu Seon entra donc dans l’immense endroit, et commença à se chercher un coin au calme et à l’ombre, si possible dans un alentour très agréable et apaisant. Et ce fut un petit banc en bois, très simple, à l’ombre des feuilles de grands arbres aux couleurs magnifiques, qui attira son attention. Il se posa donc dessus, et ferma les yeux, pour respirer l’air fruité qui venait chatouiller ses narines. Bien adossé donc, il ne remarqua pas que petit à petit, le sommeil prenait possession de son corps.

Et ce fut d’ailleurs à cause de cela qu’il ne remarqua pas qu’un pur inconnu s’approchait de lui, et vint même prendre place à ses côtés. Morphée le berçait délicatement, et le jeune coréen se laissait aller dans ses bras avec plaisir. Ce ne fut que la voix de son vis-à-vis qui réussit à le retirer de son début de sommeil. Ouvrant alors lentement ses beaux yeux bridés, il les cligna un instant, avant de tourner la tête vers le jeune homme. Le dévisageant un long instant, sans gêne, Yuu Seon ne montra pas de sentiment de surprise, et ne s’énerva même pas. Il se contentait juste de laisser son doux regard caresser le corps du taïwanais. Et après un silence un peu pesant, il finit par ouvrir la bouche, pour laisser sa délicate voix répondre

- Bonjour… Puis-je t’être utile à quelque chose ?

S'assoir. Saluer. Et repartir. C'est tout ce dont il avait envie de faire. Huang serra la sangle de la housse de son violon. Que faisait-il ici déjà ? Il n'avait rien à faire là. Ce n'était pas à lui de chercher les conquêtes, mais à elles de venir jusqu'à lui. Il ne se rappelait même plus pourquoi il s'était assit à côté d'elle. Pour oublier quelque chose qui ne s'était pas encore produit, qui ne se produirait jamais ? Le taïwanais préférait de loin les soirées où il avait l'occasion de boire et de voir les autres boire. C'était un moyen pratique pour ne pas avoir à chercher une fille qui pourrait aisément tomber dans ses bras. Des soirées bien arrosées avec des filles tout aussi arrosées. Rien de tel pour une rencontre brève et sans lendemain. Là, tout était différent. Il était contraint de faire le premier pas, même s’il n’en avait pas du tout envie. Rester ici à draguer une fille quelconque ? C’était totalement stupide, il pouvait s’en aller et rentrer «chez lui ». A quoi bon ? Il s’en mordait déjà les doigts d’être allé jusqu’à s’assoir à côté d’elle et de lui avoir dit bonjour.

Après tout, il s’était juste assit sur un banc quelconque et avait salué pour être poli. Il n’avait aucun compte à rendre à personne. L’étudiant posé sur ses cuisses la housse de violon et commença à regarder les alentours : pas grand monde, il était encore tôt. Une chance de ne pas avoir toute la population de Séoul qui vient se reposer ou s’amuser dans le grand parc de la ville. Une chance qu’il n’y ait pas énormément de monde au cas où il préfèrerait prendre ses jambes à son cou. Non, il s’était juste assit là, sans réelles intentions, juste là, pour profiter du beau temps et du moment qui passe.

Commençant à penser, à réfléchir, à flâner à l’intérieur de sa mémoire, une voix venant d’ailleurs le réveilla. Une voix plutôt douce. Une voix ni trop cristalline ni trop rauque. Une vois ni féminine ni masculine. Une voix étrange et pourtant si douce et si mélodieuse. Après avoir déglutit si difficilement, Huang tourna légèrement la tête et scruta du regard la personne à côté de lui : bien habillée, bien coiffée et maquillée, elle était vraiment très jolie. Mais quelque chose le perturbait. Elle était sûrement trop jolie pour être réelle. Devenait-il fou comme sa mère ? Non non, elle était bien là, assise à côté de lui et il avait bien entendu. Si elle pourrait lui être utile à quelque chose ?

*Tu veux pas sortir avec moi ? Non, on se connait pas, oui t’es mignonne. Allez quoi, juste pour éviter que je devienne gay !*.

Huang étouffa un rire. Rares étaient les fois où il riait, mais rien qu’à l’idée de sortir une telle phrase, réellement, cela le faisait rire. Il se frotta le menton avant de se retourner, l’air totalement sérieux, sans aucun sourire, vers la jeune femme et lui dit brièvement :

« - Non merci. Je venais juste m’assoir. Regarder les autres. ».

Puis Huang se remit face au parc, pour observer et contempler plus minutieusement les passants. Il serrait de plus en plus fort la sangle dans la paume de sa main. Non, jamais il ne pourrait réussir à draguer qui que ce soit dans ces conditions là. C’était trop dur pour lui de parler plus. C’était trop dur pour lui de la complimenter. C’était trop dur pour lui. Tout lui semblait si dur. S’il suffisait de quelques notes pour ensorceler une personne, cela ferait bien longtemps qu’il serait heureux et qu’il rendrait heureux une personne qu’il pourrait aimer.

Jamais il ne se lasserait d’observer les autres. C’était vraiment intéressant de constater à quels points les réactions et gestes de différentes personnes pouvaient autant distincts. Car le taïwanais n’était pas le premier inconnu à venir aborder notre lycéen alors qu’il se trouvait seul dans un lieu quelconque. D’autres avaient déjà pris l’initiative, soit pour lui demander un service, soit pour tenter de le draguer. Et cela l’amusait assez. Pourtant, c’était bien la première fois que quelqu’un venait lui parler de lui-même, mais en étant visiblement gêné et mal à l’aise. Et il fallait bien avouer que cela troublait Yuu Seon, qui ne comprenait pas le comportement de son vis-à-vis. Pourquoi avoir prit place à ses côtés s’il était autant mal à l’aise ? Surtout qu’il y avait non loin d’autres bancs, et libres ! M’enfin, peut être que s’il arrivait à avoir une conversation avec ce jeune homme, il comprendrait son choix. Nous verrons bien !

Voyant que l’inconnu semblait se perdre dans ses pensées, le coréen en profita pour reprendre son observation. Et ses yeux noisette se posèrent sur la housse placée sur les genoux de son vis-à-vis, qui d’ailleurs ne lâchait pas la sangle, comme s’il avait peur qu’on la lui vole. Le fixant un long moment, il commençait à réfléchir aux possibilités de l’origine de son contenu, sa curiosité ayant été touchée. Et il en conclu rapidement qu’il devait s’agir d’un instrument de musique. Mais lequel, il ne savait pas encore, ayant plusieurs suggestions en tête. Finalement l’androgyne fut sortit de ses pensées en entendant un rire étouffé. Il releva donc la tête, avant de regarder le jeune homme, qui reprit la parole sans même un sourire. Etait-il asocial ? Se décidant à entamer une conversation, Yuu Seon prit la parole à son tour, avec une douceur délicieuse

- Tu as l’air de tenir énormément au contenu de cette housse… C’est un instrument de musique n’est-ce pas ? Serais-tu musicien ?

Le lycéen avait toujours eut un profond respect pour les gens excellant dans le domaine de la musique. Lui avait apprit un temps le piano, mais n’avait pas continué par la suite. Le stylisme avait prit le dessus, et il s’était totalement délaissé de l’instrument. M’enfin. Attendant une quelconque réponse de son vis-à-vis, il lui observa alors les traits du visage. Et ce qui ce faisait remarqué de suite, c’était qu’il n’était pas vraiment émotif. Un peu déçu, il détourna lui aussi le visage pour regarder les alentours. Après tout, au départ, s’il était venu ici, c’était bien pour la tranquillité du lieu mais également sa beauté ! Mais finalement, le fils Lee se frotta l’avant bras gauche, nerveux. Il détestait ce genre d’ambiance, pensante et silencieuse. Il préférait rire aux éclats et s’amuser que d’attendre une vaine réaction de la part de son interlocuteur. Alors, avec un léger soupire, le châtain tourna de nouveau la tête vers le jeune homme à ses côtés. Le fixant, il lui adressa tout de même un tendre sourire

- Tu sembles tendu, et pas vraiment à l’aise… Tu veux qu’on change d’endroit ? Je peux te payer un verre si tu veux, ça ne me dérange pas !

Maintenant, tout ce qu’il lui restait à faire, c’était d’attendre une réponse. Et Yuu Seon espérait vraiment que l’inconnu allait accepter son offre, ne supportant plus de rester ainsi. D’ailleurs, si jamais celui-ci refuserait, alors il le harcèlerait de questions en tout genre. Car ce comportement froid et indifférent l’intéressait, et il ne comptait pas laisser sa nouvelle découverte partir, sans avoir eut davantage de renseignements à son sujet !